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Centre Africain d'Etudes Supérieures en Gestion

SOW, vous résidez au Canada où vous assumez aujourd’hui la fonction de Conseiller au Centre d’expertise en cycle de vie des données au bureau de la sécurité Desjardins. Pouvez-vous nous parler de l’organisation qui vous emploie et de vos responsabilités en tant que Conseiller.

Desjardins est un groupe financier coopératif. C’est le premier groupe coopératif en Amérique du Nord. Il regroupe 7,5 millions de membres et de clients. Ces deux catégories d’acteurs bénéficient des services de la coopérative, à la différence que celle-ci appartient aux membres.

Le groupe coopératif Desjardins a près de 50.000 employés et 300 milliards de dollar sous actif. Le groupe comprend plusieurs filiales dont le groupe « Technologie Desjardins » dans lequel je travaille, des entreprises intervenant dans l’assurance, les marchés financiers, la gestion des patrimoines, etc. En somme, nous intervenons dans toute la chaîne des valeurs au niveau de la finance. C’est l’un des plus gros employeurs au Canada. Avec la filiale Desjardins International, nous intervenons également partout ailleurs dans le monde, notamment en Afrique de l’Ouest et de l’est, en Asie et en Amérique centrale. Ce sont les entités de cette filiale qui ont mis en place PAMECAS au Sénégal et toutes les institutions autour la CIF, la confédération des institutions africaines, présentes un peu partout au Mali et au Burkina Faso.

Pour en revenir à moi, au niveau du Groupe Technologies Desjardins, nous avons récemment mis en place un centre d’expertise en cycle de vie des données. La mission de ce centre est de veiller à la conformité des outils de gestion du groupe avec les différentes lois, notamment les lois sur les informations personnelles et la loi européenne sur la protection de données. Il faut savoir que le groupe Desjardins a 120 ans d’existence et qu’avec son niveau d’activité notamment sur les TIC, il utilise aujourd’hui des centaines d’applications et des plateformes technologiques qui doivent répondre aux normes établies par les régulateurs. Pour être à la fois plus concret et simple, quand, par exemple, une exigence d’affaires demande la conservation d’une donnée pendant 5 ans, l’application ne doit pas aller au-delà. Notre mission est d’assurer que cette application se conforme à la réglementation.

Quel est votre parcours professionnel ?

Moi, à la base, je viens du monde de la consultance. Quand j’ai terminé ma maitrise en Gestion des entreprises, j’ai commencé à travailler avec des consultants. Cela m’a forgé et donné des outils essentiels pour le monde de l’entreprise. Plus tard, j’ai rejoint ACEP, une coopérative d’épargne et de crédit au Sénégal, où j’ai commencé en tant qu’auditeur avant d’occuper d’autres postes de responsabilités. C’est d’ailleurs cette organisation qui m’a permis d’aller me former au CESAG au programme de Master en Finance solidaire. À la suite de cette formation, j’ai rejoint en 2011 Desjardins International à travers son programme au Sénégal dénommé Centre de Traitement Informatisé (CTISN). Là-bas, nous avons travaillé à mettre en place des plateformes mutualisées pour les mutuelles d’épargne et de crédit déjà au Sénégal pour les PME. Parce que nous savions que ces technologies coutaient excessivement cher et qu’il était difficile pour ces institutions de les gérer de bout en bout et les faire évoluer afin qu’elles puissent répondre aux besoins de transformation digitale. Et nous, notre vision était de mutualiser ce travail et permettre à ces structures de se dégager de cette fonction support pour se concentrer sur leur cœur de métier afin d’avoir plus d’impact sur les populations. Nous avons voulu étendre le projet à d’autres domaines et d’autres partenaires, mais, malheureusement j’ai dû venir au Canada pour des raisons personnelles. Ici, je me suis formé dans le domaine des technologies et obtenu un DESS et un Master. Par la suite j’ai commencé à travailler comme Business Analyst pour ASTEK International, une société française de conseil en TI, qui est bien implantée en Amérique du Nord. C’est grâce à cette société, que j’ai renoué, en tant que consultant, avec le Mouvement Desjardins. Depuis 2018, j’y travaille en tant qu’employé dans le cadre de l’important projet du Centre d’expertise qui mobilise une expertise de pointe et dont la mission est de mettre l’ensemble des applications et plateformes technologiques du Mouvement Desjardins en conformité avec les textes de lois.

Vous êtes détenteur du Master Africain en Finance Solidaire du CESAG. Pensez-vous que cette qualification a été utile dans votre carrière ?

Absolument (rires). Je pense même que ç’a été un point déterminant pour moi. Quand mon ancien Directeur Général m’a proposé cette formation au CESAG, j’étais un peu sceptique parce que nous étions sur des projets et je me déplaçais souvent à l’intérieur du pays. Mais quand j’ai vu le contenu du programme, cela me paraissait tellement riche que j’ai accepté de saisir l’opportunité. Je n’ai pas eu tort parce j’avoue que j’ai énormément appris avec le groupe que nous avons formé au cours de cette formation. Ce groupe comprenait plusieurs nationalités d’Afrique. Nous étions la première cohorte de ce programme et nous avions des intervenants de qualité provenant aussi bien d’Afrique, notamment de la BCEAO, que d’Europe et d’Asie. Les échanges y étaient riches et nous avons développé des compétences qui ont été déterminantes lors de mon recrutement. Par ailleurs, j’ai beaucoup profité du réseau que nous avons pu développer à la sortie du CESAG.

De mon passage au CESAG, je retiens donc beaucoup de bonnes choses, notamment les belles amitiés nouées et les échanges de très haut niveau entre professionnels. Concernant les échanges, je me souviens encore de ce débat houleux sur la pertinence du nouveau référentiel comptable et de la nouvelle loi sur la microfinance en cours d’élaboration alors. Des moments qui, assurément, vous enrichissent.

Vous vivez au Canada depuis une décennie. Comptez-vous retourner un jour en Afrique pour mettre votre expertise au service des Etats et des entreprises ? Je vous rappelle que la numérisation des systèmes d’information et la digitalisation des services sont au cœur de la transformation de la vie économique en cours en Afrique.

Pour dire vrai, je n’ai jamais vraiment coupé le pont avec le Sénégal et l’Afrique. J’ai gardé toujours des liens forts avec tout un réseau de consultants avec qui je continue de travailler. On savait que l’avenir c’était la transformation digitale. Nous nous sommes battus pour une adoption de la digitalisation dans les entreprises africaines. Pour des questions de perception et culturelle, c’était difficile. Mais je pense que la pandémie va changer beaucoup de choses et que les gens vont comprendre la nécessité de s’orienter vers la digitalisation.

Mon rêve, c’est de pouvoir mettre toute l’expertise que j’ai pu acquérir ici, au service des entreprises africaines. On a commencé à le faire. Actuellement, j’accompagne certaines PME dans le cadre de certains programmes, dans l’élaboration et la mise en œuvre de leurs plans d’internationalisation et, surtout, de digitalisation parce qu’aujourd’hui, les marchés sont des places numériques et que les entreprises ont besoin d’être accompagnées dans ce domaine. Mon réseau de consultants et moi continuerons à appuyer cela.

Parlant de la transformation de la vie économique, l’on ne peut ignorer la Pandémie de la COVID qui aura causé bien des changements dans nos réalités sociales et professionnelles. Comment le jeune Africain que vous êtes, a vécu cette tragédie humanitaire au Canada ?

Oui (rires). Une vraie tragédie ! Ici, la première vague a été terrible. On a vu des choses horribles. Les gens mouraient de manière atroce. Des membres de mon réseau ont été emportés par cette pandémie. Des moments très difficiles à vivre pour toute personne en général et pour un Africain en particulier. Sur le plan professionnel, ça a bouleversé nos habitudes. Maintenant on fait le télétravail. Il y a donc moins de socialisation. Les contacts physiques entre amis se sont amoindris. Mais nous sommes restés aussi efficaces qu’avant la pandémie.  La Covid va changer les choses de manière durable sur le plan social et professionnel.

Au vu de tout ce que vous avez réalisé, nous considérons que votre parcours est réussi. Quels conseils pouvez-vous donner aux plus jeunes professionnels, particulièrement ceux et celles formés au CESAG ?

J’ai toujours trouvé que l’enseignement au CESAG est de qualité. Le Centre a mis en place tout ce qu’il faut pour un accompagnement de qualité. Je le sais d’autant plus qu’après y avoir terminé ma formation, j’ai continué à y intervenir en appuyant les étudiants dans leurs travaux. Mon conseil à l’endroit des jeunes, c’est de continuer à se former, même après une formation aussi bonne. Aujourd’hui, c’est la formation continue qui fait la différence dans un contexte où il y a une accélération des changements dans l’environnement des affaires. Avec tout l’apport des nouvelles technologies dans ce contexte, les entreprises attendent des futurs employés un esprit entrepreneurial. Pour le professionnel, cela revient à rechercher perpétuellement ce qu’il peut apporter en termes d’initiatives générant de la valeur ajoutée pour l’entreprise. Parce qu’il faut pouvoir faire une proposition d’initiatives innovantes au moment de son recrutement. Cela va l’amener à acquérir la double compétence dans son métier et dans les technologies permettant d’y accélérer la performance. A cet effet, Il doit s’informer sur les technologies en vogue dans son domaine de compétences. Enfin, je conseillerai aux jeunes de ne pas être attentistes, mais proactifs et créatifs dans leur domaine de compétences pour créer les métiers de demain. Il faut sortir des sentiers battus.